CROSSING ART
RÊVEUSE
Llane' Mayo' (1969)
Llane' Mayo est née en 1969 entre Gascogne et Pays Basque ; sa famille est le symbole même de la diaspora, disséminée en Argentine, en Espagne, en Italie, à La Réunion et en Australie.
Son univers créatif est riche de toutes ces cultures, d'images et de partages, de morceaux de vie et d'instants magiques saisis au hasard de rencontres et d'aventures.

Elle commence à façonner le bois très jeune, aimant sa sensualité, le toucher, le modeler... C'est pour rendre hommage à son père, lui aussi artiste, qui lui a tout appris en la matière, qu'elle travaille et façonne le métal, indomptable et froid en apparence, qui livre ses secrets et se donne dès qu'on prend soin de le chauffer, de le rougir, de le tordre… expérience initiatique de la sculpture, de l'artiste et de son modèle en noces impétueuses…
Sa création "Harrizko Etxea"(la maison de pierre) se veut riche de sens (au pluriel) : une ode à la mémoire des basques dispersés à travers le monde (MUNDUAN ZEHAR !!!), qui ont quitté leur maison pour se construire une vie meilleure dont leur future demeure sera le reflet.
Exposition "Regards d'artistes
sur la diaspora basque"
Raconter la diaspora basque autrement.
L’émigration et le voyage des Basques à travers le monde constituent un phénomène ancien qui relève tantôt de la nécessité matérielle et de déambulationsdélibérées, celles des pêcheurs à la baleine ou des oisifs globe-trotters d’aujourd’hui, tantôt d’un exil subi dû au climat politique, telles que les guerres carlistes et napoléoniennes, les crises de l’emploi ou la dictature franquiste. La survivance de l’identité basque a donné lieu à une communauté plurielle, la diaspora basque, dont l’éloignement, la persistance identitaire et l’attachement viscéral expliquent que ceux restés au pays reconnaissent ces migrants partiellement « autres » comme les leurs. De fait, le Pays basque, avec ses sept provinces, les considère symboliquement comme une part de lui-même en les nommant « la huitième province ».
La diaspora basque est un topos bien connu de la recherche en anthropologie, histoire, linguistique et littérature. On ne peut guère en dire autant de son rapport avec les arts. Nous engouffrant dans cette brèche passionnante, nous avons imaginé l’exposition « Regards d’artistes sur la diaspora basque », en vue de faire connaître autrement cet important pan d’histoire et d’actualité. Cette exposition est née d’un concours d’art actuel qui invitait à réfléchir sur ce thème, créant dès lors une sorte de réciprocité au sein du projet « Les arts et la diaspora basque », où les chercheurs analysent l’art et où les artistes livrent leur vision de l’histoire.
Il s’agit ici de conjuguer la réflexion historique au présent, plus seulement en tant que froid sujet d’étude mais comme mémoire vive célébrant l’humain, le vécu, le sentiment profond. Les œuvres présentées composent un tableau assez complet de la diversité des expériences et des émotions suscitées par ces exodes intemporels.
Dans un premier temps, trois artistes invités, Zoe Bray, Benoit Pingeot et Michel Hacala, proposent une galerie de portraits dessinant le visage de la diaspora basque, mêlant les artistes exilés politiques, Nestor Basterretxea et Jorge Oteiza, aux anonymes qui font l’histoire, des pêcheurs de baleine et de thon jusqu’aux dernières générations d’émigrés, à l’instar de Marie-Louise Lekumberry, fille d’un berger basque du Nevada. L’exposition se structure ensuite autour de thèmes emblématiques de ces mouvements migratoires : le déplacement en lui-même – Sur la route-, la découverte et le sentiment de l’étranger –La vie ailleurs-, la tension entre le bonheur de la terre promise et le mal du pays –Nostalgies...-, etla perception du voyage dans les terres d’origine –Au pays-. La diversité des supports –peinture, sculpture, photographie, installation, multimédia- fait toute la richesse de cette exposition, où se croisent les approches traditionnelles et les démarches résolument contemporaines, une symbolique figurative parfois académique et des évocations souvent plus conceptuelles, le tout se rejoignant dans le fait de raconter la grande histoire à travers le prisme de récits a priori plus modestes et profondément ancrés dans notre humanité.
Les artistes entretenant tous un rapport intime à la diaspora basque, qui marque leur mémoire familiale ou qu’ils l’ont vécu eux-mêmes, nous avons ici pris le parti peut-être audacieux de leur laisser la parole. Leurs réalisations ont ceci de commun de traduire des sentiments très personnels qui n’engagent qu’eux-mêmes. C’est pourquoi, si la première partie du catalogue fait la part belle aux œuvres, la seconde, proposant une lecture interprétative, compile des textes imaginés par les artistes eux-mêmes, qui exposent ainsi leurs démarches créatives et symboliques.
Exempts d’ethnocentrisme, ce thème des minorités en exil, loin d’être exclusif au Pays basque, fait de ces œuvres des manifestations personnelles autant qu’universelles. Les expériences de l’ailleurs, la force identitaire, le plaisir du voyage, font appel à des émotions profondes qui permettent à qui veut de s’identifier à ce peuple aux nouvelles racines.
Viviane Delpech
Chercheur en histoire de l’art
Université de Pau/Eusko Ikaskuntza
Commissaire de l’exposition











